LE GRAND VITRAIL DU GRAAL
Comme dans toutes les réalisations présentes dans l'église de
Tréhorenteuc, l'abbé Gillard, à la lumière du grand vitrail,
propose plusieurs lectures, le Recteur adresse tout d'abord un
message cultuel, essence même de sa mission pastorale. Il
propose aussi une lecture idéographique à travers laquelle, par
symboles, il exprime le lien, l'harmonie et la compréhension
nécessaires entre les hommes, les cultures, les civilisations...
Par la beauté du vitrail, il se tourne enfin vers ceux qui
emportent simplement, par le plaisir des yeux, une vision
merveilleuse... avec peut-être l'envie de revenir pour tenter
d'en savoir plus.
LE LAPIN
Sur le plan symbolique, le lapin est lunaire. Dormant le jour,
il gambade la nuit. Comme la lune, il sait apparaître et
disparaître, avec le silence et l'efficacité des ombres... Par
sa nature, il est l'intermédiaire entre l'Homme, dont il est
l'animal familier, et l'Invisible.
En bas et à gauche du grand vitrail, par sa présence discrète
aux côtés d'un de ses comparses, le lapin chuchote à qui veut
bien l'entendre qu'il existe des secrets à découvrir derrière
l'apparence des images.
Le lapin est le gardien des secrets du vitrail. Il en est
aussi le passeur. À sa façon, il tend l'indispensable clé de la
"Porte est en dedans". À chacun d'ouvrir les yeux pour tenter de
décrypter le sens caché des messages.
LE GRAAL, LE CHAUDRON
Les Celtes avaient leur Graal. Il était représenté par le
Chaudron de la Connaissance.
Chez les Chrétiens, dans la légende, le Graal a pour origine
une émeraude qui est sertie sur la couronne de l'Ange de
lumière, Lucifer. Lorsque celui-ci commet la faute, son émeraude
se détache, tombe du ciel et atterrit sur le Paradis terrestre.
Retrouvée par les hommes, elle est transmise de générations en
générations jusqu'à devenir la coupe utilisée par Joseph
d'Arimathie pour recueillir le du Christ. Par la suite, le Graal
disparaît. Les chevaliers de la Table Ronde ont alors pour
mission de partir à sa recherche : la fameuse Quête du Graal.
Le meilleur d'entre eux, Galaad, le chevalier au cœur pur,
devient l'élu.
Placé au cœur du grand vitrail qui lui est dédié, le Graal
illumine tout ce qui l'entoure. La coupe est de couleur verte,
couleur de l'espérance d’une vie éternelle.
Lorsqu'on se trouve dans l'église, on observe que la coupe du
Graal est présente sur les trois vitraux visibles dans le chœur.
La tonalité du vert évolue de façon chronologique : du vert
foncé durant le repas de la Cène, il devient plus clair lors de
la crucifixion, pour finalement devenir lumineux et irradiant
sur le grand vitrail à l'instant de la résurrection de Jésus.
LE CHRIST ET JOSEPH D'ARIMATHIE
Le Christ est debout. Sa tête est couronnée d'une auréole.
Agenouillé en face de lui, son disciple Joseph d'Arimathie
vient recueillir les gouttes de son sang dans la coupe du Graal,
dont il devient le gardien.
Sur le flanc du Christ, on remarque la plaie qui a été portée
par la lance d'un légionnaire romain. Cette plaie devrait se
situer à gauche, côté cœur. En la faisant figurer à droite,
l'abbé Gillard a voulu souligner la signification symbolique de
cette blessure d'où jaillissent, à travers le jet de sang, la
lumière de vérité et les merveilles de Dieu déversées dans la
coupe du Saint Graal.
LES COULEURS ET LES SYMBOLES
Comme c'est le cas pour les chevaliers réunis en harmonie
autour de la Table Ronde, l'abbé Gillard, à travers le grand
vitrail, a souhaité exprimer le message du Christ visant à voir
s'établir, entre tous les hommes, l'harmonie, l'amour, la paix
et l'universalité.
Cet objectif se manifeste symboliquement par les couleurs.
Dans le vitrail, on observe une dominante bleue, celle du
masculin, et une autre rouge, dont le dérivé est le rose dévolu
au féminin.
Avec la fusion du bleu et du rouge, on obtient la couleur
violette (comme la robe portée par le Christ) : le mélange
parfait, l'harmonie parfaite entre l'homme et la femme et celle
de tous les hommes au sens large.
Parallèlement aux couleurs, cette harmonie est traduite par la
coexistence de plusieurs mondes : l'image du Christ et des
évangélistes pour les Chrétiens, le monde celte avec
l'omniprésence des feuilles de chêne sur l'ensemble du vitrail
(symbole du culte de la nature) et le monde légendaire avec la
quête du Graal des chevaliers de la Table Ronde.
La conception du vitrail répond aussi à une harmonie parfaite
: celle qui découle du Nombre d'or dont l'existence est rappelée
par l'inscription 1,618 figurant sur le mur de l'église près des
fonts baptismaux.
LES QUATRE ÉVANGÉLISTES
Sur les côtés du vitrail, on peut voir les quatre
évangélistes. Associés autour du Christ, ils forment le
tétramorphe qui symbolise l'universalité de la présence divine,
comme le souligne l'inscription phonétique " le Seigneur Dieu
Maître de tout ", qui figure sur le mur de l'église, en dessous
du grand vitrail.
Ces quatre écrivains sacrés ont écrit la vie et la doctrine de
Jésus Christ. À partir du Vème siècle, dans les œuvres
artistiques, les évangélistes sont souvent représentés sous
forme de figures symboliques empruntées à l'Apocalypse de Saint
Jean. Un ange est attribué à Saint Mathieu, un lion à Saint
Marc, un taureau à Saint Luc et un aigle à Saint Jean.
C'est ainsi qu'ils figurent sur le grand vitrail.
LE BLASON 1
Nous sommes en Bretagne. Ce blason en est le symbole avec les
hermines. Il est divisé en cinq parties. L'une d'entre elles est
grisée. Elle rappelle que ce vitrail a été réalisé peu de temps
après la création administrative de la région Bretagne et
l'amputation du département de la Loire Inférieure, devenu Loire
Atlantique, dont la Bretagne doit faire le deuil depuis le
régime de Vichy.
LE BLASON 2
Nous sommes à Tréhorenteuc. l'aigle présent sur le vitrail
évoque celui qui est représenté sur les armoiries de la famille
de l'Aage qui furent les seigneurs de Rue Neuve et généreux
donateurs de l'église durant plusieurs générations.
LE BLASON 3
Le blason du Saint-Sépulcre est formé de cinq croix potencées
rappelant les cinq plaies de Jésus.
Il est représenté cinq fois sur le sol de l'église Cette croix
de Jérusalem, dite aussi croix de Saint André, fut celle des
Croisés.
Chaque réalisation présente dans l'église de Tréhorenteuc
renvoie à une autre. Le grand vitrail a pour miroir la mosaïque
qui lui fait face. Tous les symboles présents dans le grand
vitrail s'y reflètent et s'y transposent. Le Christ est
représenté par le Cerf blanc dont la tête est ceinte d'une
auréole. Il porte au cou un collier où est suspendue une croix.
Il est entouré de quatre lions, les quatre évangélistes. Dans la
légende, Lancelot voit apparaître le cerf blanc et les lions.
Ils passent sans daigner lui adresser un regard avant de
disparaître par enchantement. Lancelot s'interroge. Le soir, un
vieillard l'incite à renoncer à sa vie dissolue avec la reine
Guenièvre. Lancelot ne peut s'y résoudre et échoue dans sa quête
du Graal.
Dans la mosaïque, le cerf blanc, c'est le Christ du monde
chrétien, mais c'est aussi la divinité Cernunnos des Celtes.
C'est également le Merlin de la légende.
Miroir du grand vitrail, la mosaïque fait apparaître la
féminité avec la fontaine de Barenton en forme de croissant de
lune. Nous sommes dans le monde des eaux, domaine des fées. Plus
haut, les arbres de Brocéliande, dont le plus gros épouse la
forme d'un soleil, représentent le masculin. Présente dans le
grand vitrail sous la couleur violette de la robe du Christ,
l'harmonie parfaite de l'Homme se reflète sous l'apparence d'une
toute petite ancolie (chère à Léonard de Vinci) visible au
centre de la mosaïque.
Deux personnages se font face dans la partie inférieure du
vitrail. Il s'agit du Guégonnais Louis Thétiot, et de sa mère,
respectivement cousin et marraine de l'abbé Gillard. Lorsque son
fils est tué en 1944 par une rafale de mitrailleuse, Mme Thétiot
décide de léguer la ferme qu'elle lui destinait à son filleul,
l'abbé Gillard. Avec la vente de cette ferme familiale, le grand
vitrail a pu être réalisé par l'atelier Gruber en 1951.
On remarque une perle bleue située entre ces deux personnages.
Elle est un appel à la spiritualité et invite tout un chacun à
prier pour les donateurs du vitrail.
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